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  1. Les commentaires
  2. Les livres bibliques glosés

Les commentaires

MS 169, f. 100v-101r . Manuscrit médiéval ouvert : texte à deux colonnes copié sur parchemin ; page de gauche, colonne de droite sur les 2/3 de sa hauteur en partant du haut, grande initiale de couleur ornée  P marquant le début du texte "P/REUARICA" : sur fond bleu, décor de rinceaux  avec volutes sur fond rouge et vert foncé en alternance ; page de droite, partie inférieure de la colonne de droite : initiale F à l'encre rouge ourlée de bleu marquant le début du texte "F/actum est".

Rabani Mauri commentarius in libros Regum, MS 169, f. 100v-101r (vue ARCA- IRHT).

MS 169, f. 22v. Page d'un manuscrit médiéval sur parchemin : texte sur deux colonnes ; colonne de gauche en partie supérieure, initiale P à l'encre verte, ourlée de rouge marquant le début du texte "P/OST hec sequitur" ; une note dans la marge gauche, deux dans la marge inférieure ; lisière du parchemin visible en marge inférieure.

Rabani Mauri commentarius in libros Regum, MS 169, f. 22v.

 

Dès l’époque patristique, les commentaires chrétiens sur les livres bibliques se multiplièrent. À partir de l’époque carolingienne, le projet d’expliquer l’ensemble de la Bible donna lieu à de multiples anthologies exégétiques des travaux effectués durant les siècles passés, ainsi que de nouvelles œuvres, dans le cadre d’une politique ecclésiastique et culturelle initiée par Charlemagne et poursuivie par ses successeurs sur deux générations. Un exemplaire (manuscrit MS 169) du Commentaire sur les Rois de Raban Maur, daté du XIIe siècle, typique de la production clunisienne, est aujourd’hui conservé à la BIS. Le manuscrit a été abondamment annoté, montrant la permanence de son usage : ajout de titres courants en haut des feuillets, notae en marge pour signaler certains passages, augmentés de « notes en bas de page » pour expliciter leur intérêt, corrections des numérotations de chapitres pour se conformer à la normalisation biblique par exemple. La BIS conserve également un témoin, daté du XIIe siècle, du florilège augustinien de Florus de Lyon sur les Epîtres de Paul (manuscrit MS 175).

MS 166, f. 4r. Page d'un manuscrit médiéval sur parchemin : texte sur deux colonnes ; en partie supérieure de la colonne de gauche, petites initiales à l'encre rouge et verte en alternance et de module supérieur, initiale T à l'encre bleu ciel marquant le début du texte "T/ercius in Moysi libris Leviticus" ; en partie inférieure de la colonne de gauche, 3 lignes à l'encre rouge avec interlignes espacés et espaces ménagés entre syllabes des mots ; en partie supérieure de la colonne de droite, grande initiale de couleur rouge, ornée de motifs végétaux stylisés marquant le début du texte "U/ocauit autem..." ; à droite de l'initiale, alternance de lignes en rouge et vert.

Radulphus Flaviacensis, Commentarium in Leviticum, MS 166, f. 4r.

 

 

 

 

 

 

L’entreprise de Raoul de Flaix, bénédictin du nord de la France, s’inscrit dans un contexte différent : il s’agit de répondre à ce qu’il perçoit comme le danger présenté par les rites juifs (bibliques ou contemporains) pour des chrétiens à la foi vacillante, par une lecture spirituelle et morale du Lévitique, le livre du Pentateuque qui présente les prescriptions légales et leur observance. Le commentaire de Raoul de Flaix connut un succès considérable et apparaît parmi les livres que les libraires doivent pouvoir fournir aux étudiants parisiens dans la seconde moitié du xiiie siècle. Le manuscrit MS 166 est d’origine cistercienne, comme en témoignent ses enluminures.

MS 173, f. 29v. Page d'un manuscrit médiéval sur parchemin : partie supérieure occupée par un schéma à l'encre rouge (trois cercles dont les tracés s'entrecoupent symbolisant la trinité et les 3 âges de l'humanité) ; en dessous, texte à deux colonnes, marqué à son début par une initiale bleue filigranée : ""E/cce psent…"

Expositio in Apocalypsim, MS 173, f. 29v.

 

 

 

 

Considérée comme l’un des livres bibliques offrant une clef des Écritures, l’Apocalypse est au cœur du travail des exégètes : sa juste compréhension par les prédicateurs et par les fidèles dont ils ont la charge représente un enjeu central. À l’époque carolingienne, on observe ainsi une recrudescence dans la production exégétique consacrée au dernier livre du Nouveau Testament : des érudits parfois célèbres par ailleurs, tels que Théodulfe d’Orléans, ou des lettrés anonymes y consacrent commentaires, gloses ou épitomés ; l’intérêt décroît autour de l’an mil, puis connaît un nouvel essor au xiie siècle, comme en témoignent les manuscrits MS 172, MS 173, MS 174 et MS 1213 du fonds de la BIS.

À bien des égards, le Commentaire sur l’Apocalypse du moine calabrais Joachim de Flore (1135?–1202) marque un tournant dans l’exégèse de ce livre biblique. Se voulant fidèle à la lecture allégorique de l’Apocalypse professée par l’Église, il propose néanmoins une interprétation originale fondée sur la distinction de trois temps historiques, soit trois âges de l’humanité correspondant au Père, au Fils et au Saint Esprit, schématisés graphiquement. Il s’appuie pour ce faire sur des méthodes herméneutiques traditionnelles – la typologie et la symbolique des nombres – et contribue encore à dévoiler le sens spirituel par l’emploi de diagrammes traduisant sa clef de lecture trinitaire. Témoin de la place centrale du commentaire dans les bibliothèques universitaires, le manuscrit présenté ici (manuscrit MS 173) est une copie du XIVe siècle en écriture gothique avec une mise en page rigoureuse.

Pour aller plus loin, retrouvez les commentaires intégralement numérisés dans le cadre de LEGETIMAM :

Les livres bibliques glosés

MS 15, f. 53r. Page d'un manuscrit médiéval sur parchemin : Page droite d'un manuscrit médiéval, à quatre colonnes (trois colonnes en bas à droite, la troisième occupant un espace double). Colonnes 1 et 3 pour le texte principal écrites dans un gros mdule, avec par endroits des  petites lignes interlinéaires, et colonnes 2 et 4 de plus petit module. Lettrine E en haut de la première colonne à l'or et sur fond bleu avec rinceaux de couleur. Annotations marginales à gauche, la première longue de 8 lignes. Titre courant et trois lettres rubriquées en rouge et bleu. Traits de réglure horizontaux et verticaux.

Regum I-IV, Macchabæorum I-II, Paralipomenon I-II, cum glossa marginali, MS 15, f. 53r.

 

Dès le haut Moyen Âge, les commentaires sont parfois présentés sous forme de texte glosé : le texte biblique est encadré d’explications plus ou moins longues qui constituent des gloses « marginales », placées à proximité du passage biblique qu’elles éclairent. L’exégèse peut également être éclatée en éléments encore plus brefs qui s’attachent à un mot ou une expression, et qui s’inscrivent entre les lignes : on parle alors de glose « interlinéaire ».

Au xiie siècle, chaque livre biblique se voit doté d’un corpus de gloses qui tend à se fixer progressivement et que l’on a nommé, par la suite, Glose ordinaire. Au xiiie siècle, cet ensemble s’est « standardisé » et a servi de référence aux étudiants de l’Université inscrits en théologie. Ce processus s’accompagne d’un travail sur la mise en page qui est hiérarchisée, clarifiée, pour faciliter la consultation rapide des passages souhaités. On trouver parfois un système de repérage codicologique, tels les signets en ficelle cousus sur les feuillets à marquer, qui matérialisent les césures principales du livre (manuscrit MS 15).

 

MS 156, f. 32r. Page d'un manuscrit médiéval : texte à trois modules ; à gauche et au centre, texte biblique (gros module), copié une ligne sur deux, et scandé par des capitales bicolores et filigranées, rouge et bleu ; entre ces lignes, glose interlinéaire (module le plus réduit) ; autour, blocs de texte de module "moyen" (glose marginale), parsemés de pieds-de-mouche, rouge et bleu en alternance ; en haut de la colonne de texte la plus à droite, pied-de-mouche rouge avec prolongement à décor filigrané bleu et rouge dans la marge supérieure.

Jeremias, cum glossa marginali et interlineari, MS 156, f. 32r.

 

 

 

 

 

 

Le manuscrit MS 156 donne à voir que cette « standardisation » porte aussi sur la mise en page, dont le perfectionnement s’effectue à cette époque. La hiérarchie entre les textes se saisit au premier coup d’œil : la Bible est copiée en gros module, une ligne sur deux, et scandée par des capitales bicolores et filigranées, tandis que les gloses marginales, en plus petit module, forment des blocs compacts distingués par des pieds-de-mouche colorés. Les gloses interlinéaires sont écrites finement dans un module encore plus réduit. Le puzzle visuel ainsi créé est le fruit d’une mise en page maîtrisée, qui doit composer entre l’importance croissante des gloses et leur distribution inégale vis-à-vis du texte biblique. L’objectif du copiste est de fournir un outil exégétique efficace aux lecteurs sans les perdre dans le jeu de renvois entre le texte biblique et ses gloses.

MS 157, f. 2v. Page d'un manuscrit médiéval : texte à trois modules ; au centre de la page, initiale E ornée marquant le début du texte "E/TFACTVE", à décor de rinceaux bleu, rouge et vert sur fond or, dans un encadrement à fond bleu, sous l'encadrement lettres capitales dorées sur fond rouge ("TFACTVE"), en-dessous, colonne de texte (le plus gros module) avec glose interlinéaire (module le plus réduit) ; dans le reste de la page, texte de module "moyen" (glose marginale) ; dans la marge gauche (partie inférieure), note dessinant un triangle pointant vers le bas et pied-de-mouche bleu avec prolongement à décor filigrané bleu et rouge dans la marge inférieure.

Ezechiel et Daniel, cum glossa marginali et interlineari, MS 157, f. 2v.

 

 

 

 

Depuis le haut Moyen Âge, certains auteurs avaient l’habitude de signaler en marge, par une abréviation, l’autorité qui leur servait de source pour un passage donné. Le manuscrit MS 157 montre combien cette pratique perdure dans la Glose ordinaire : Greg. pour Grégoire le Grand, Jer. pour Jérôme. All. pour une glose de Jérôme (f. 2v) et Mor. pour celle de Grégoire (f. 3r) signifient allegorice et moraliter : ces passages sont des interprétations spirituelles du texte biblique, par différence avec d’autres qui l’expliquent littéralement.

MS 1213, f. 18r. Page d'un manuscrit médiéval : texte à longues lignes ; en partie supérieure, deux initiales, la première à l'encre rouge ourlée de bleu ("D/isertus"), la seconde à l'encre bleue ourlée de rouge ("F/oca") et  deux incipit mis en valeur à l'encre rouge ; à la première ligne de texte, hampes de lettres très allongées débordant sur la marge supérieure.

Glosæ in Genesim usque ad Apocalypsim, MS 1213, f. 18r.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Il arrive parfois que la glose soit dissociée du texte biblique. Elle est alors copiée à longues lignes, comme en témoigne le manuscrit MS 1213, daté de la deuxième moitié du XIIe siècle. Le repérage dans le texte est aisé : les titres des différents livres bibliques apparaissent sous forme de rubriques, à l’encre rouge, tandis que le début de chaque glose est marqué par une initiale ornée, à l’encre bleue et rouge ; les différents lemmes objets d’une glose sont ensuite distingués par l’emploi d’une initiale rubriquée.

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