Une tradition ancienne
Avec la Chine et la Corée, le Japon possède une des plus riches traditions cartographiques au monde. Les cartes japonaises les plus anciennes datent du VIIIe siècle (période Nara). Le premier style de carte japonaise connu, de type « Gyōki », tire son nom du moine bouddhiste Gyōki Bosatsu (668-749) auquel la paternité de ce mode de représentation fut attribué sans qu'il soit possible de déterminer quel fut son rôle réel dans l'émergence de cette tradition. Longtemps reproduit, ce type de carte donne à voir le découpage de l'archipel en provinces symbolisées par des formes globuleuses. Aucun système de projection et de mise à l'échelle n'est utilisé et le rendu géographique semble très approximatif mais l'objectif de ces cartes est avant tout de fournir des informations sur la répartition des fiefs et leurs situations relatives.
La cartographie de l'archipel prend son essor à partir de la fin du XVIe siècle, sous les impulsions successives du pouvoir shogunal pour qui des indications géographiques et administratives précises représentent un enjeu stratégique. Cinq grands projets de cartographie des provinces sont ainsi lancés au cours du shogunat Tokugawa (1605, 1633, 1644, 1697 et 1835). Les cartes des provinces réalisées dans le cadre de ces campagnes contribuent à l’élaboration de quatre cartes générales du Japon commanditées par le pouvoir, qui voient le jour dans les années 1630, en 1670 et en 1702. Le shogunat promeut également la confection de cartes des villes et des domaines, ces différents projets cartographiques favorisant le contrôle indirect des daimyō (seigneurs féodaux).
Dans le même temps, la cartographie japonaise se popularise. L'engouement pour la carte imprimée sur feuille isolée, apparue au XVIIe siècle, touche un public plus large que celui des cercles du pouvoir ou celui des seuls érudits. Porté par ce nouveau marché, un style de carte original se développe à la fin du XVIIe siècle et tout au long du XVIIIe siècle, dans le sillage des réalisations d'Ishikawa Ryūsen, artiste du mouvement ukiyo-e. Il se caractérise davantage par ses qualités esthétiques que par son souci d'exactitude.